Vous exploitez déjà un système de contrôle-commande performant, et vous cherchez à y intégrer un Energy Management System (EMS) sans compromettre la stabilité ni la cohérence de votre architecture ? Cette intégration soulève des enjeux techniques majeurs qu’il ne faut pas sous-estimer.
L’EMS ne remplace pas le contrôle-commande : il le complète en apportant une vision énergétique globale. Mais pour agir efficacement, il doit s’appuyer sur les RTU, IED, automates et SCADA, seuls capables d’exécuter des actions en temps réel sur le terrain. Sans ce lien, l’EMS reste isolé et inefficace.
Découvrez dans cet article comment assurer une interaction fluide, sécurisée et performante entre votre EMS et votre infrastructure de contrôle-commande existante.
Les rôles respectifs de l’Energy Management System (EMS) et du contrôle-commande
L’Energy Management System (EMS) et les systèmes de contrôle-commande interviennent à des niveaux complémentaires, mais strictement différenciés de l’architecture énergétique.
L’Energy Management System assure une mission de pilotage énergétique global. Il supervise l’allocation dynamique des ressources, la prévision de la production et de la consommation, ainsi que le pilotage multi-actifs. L’EMS est responsable de la cohérence énergétique à l’échelle du site ou du réseau, en optimisant en temps réel les flux d’énergie pour maximiser la performance, assurer le respect des engagements contractuels vis-à-vis des gestionnaires de réseau (RTE ou Enedis) et anticiper les contraintes liées à la production.
À l’inverse, les systèmes de contrôle-commande (CCN) se positionnent au plus près des équipements de terrain. Constitués de SCADA, RTU, IED et automates (PLC), ils exécutent les consignes en temps réel et assurent un pilotage opérationnel local. Leur rôle est d’acquérir les mesures directement depuis les capteurs et actionneurs, de les traiter à grande vitesse et d’assurer la sécurité du fonctionnement.
Dans ce contexte, l’Energy Management System n’a aucune interaction directe avec le matériel terrain : il a besoin du contrôle-commande pour accéder aux mesures et relayer ses consignes de pilotage énergétique vers les équipements. Sans ce lien, l’EMS serait privé de la granularité et de la fiabilité des données nécessaires à ses calculs et ne pourrait pas agir sur les ressources physiques.
Les points de contact entre un EMS et un CCN : que s’échangent-ils ?
L’Energy Management System (EMS) et le Contrôle Commande Numérique (CCN) échangent des flux de données bidirectionnels en continu : l’un pour informer et analyser, l’autre pour agir et exécuter.
Le contrôle-commande (CCN) collecte un ensemble d’informations terrain indispensables pour l’EMS :
- Tensions, courants, puissances actives et réactives mesurées au niveau des équipements électriques.
- États logiques des équipements (disjoncteurs, onduleurs, relais de protection).
Toutes ces données sont remontées vers l’Energy Management System (EMS). Il traite ces informations pour prédire les évolutions énergétiques, détecter des dérives, et préparer des actions correctives ou préventives.
En parallèle, l’EMS envoie des commandes descendantes vers le CCN pour agir sur le terrain. Ces consignes incluent :
- La modification de la consigne de production (notamment utilisée dans le secteur des énergies renouvelables)
- L’ajustement de la puissance de stockage sur une batterie (BESS).
- La demande d’effacement partiel ou total de certaines charges industrielles en fonction des contraintes réseau.
Un point clé dans cette interaction est la synchronisation temporelle : tous les événements doivent être horodatés précisément, avec des protocoles de synchronisation NTP (Network Time Protocol) ou PTP (Precision Time Protocol). Sans horodatage fiable, la corrélation entre les événements terrain et les décisions EMS serait imprécise, compromettant l’efficacité du pilotage.
Faire communiquer un Energy Management System et un contrôle commande grâce aux bons protocoles
Pour qu’un Energy Management System interagisse efficacement avec un contrôle-commande, le choix des protocoles de communication est donc stratégique. Chaque protocole impose ses propres contraintes de format, de fréquence d’échange et de robustesse réseau :
Modbus TCP/IP
Protocole historique principalement utilisé pour lire et écrire des valeurs analogiques ou numériques sur des équipements standards. Très adapté aux infrastructures simples ou aux matériels existants ne supportant pas les standards modernes. Toutefois, sa faiblesse native en cybersécurité impose de le sécuriser via des tunnels VPN dans les architectures critiques.
IEC 61850
Référence mondiale pour les postes électriques et sites énergétiques critiques. Il propose une communication structurée par objets (Logical Nodes) via MMS pour l’échange de mesures et d’alarmes, et GOOSE pour la transmission ultra-rapide d’événements critiques (moins de 4 ms). Ce protocole offre une forte standardisation et garantit la synchronisation des opérations, indispensable dans les architectures complexes type ENR raccordées RTE.
OPC UA
Conçu pour assurer une interopérabilité maximale entre équipements et logiciels industriels, OPC UA combine flexibilité et sécurisation native (TLS, gestion de certificats). Il est particulièrement efficace pour interfacer l’EMS avec des SCADA multi-fournisseurs ou intégrer des couches IT/OT sur des réseaux industriels modernes.
À noter : OPC UA est avant tout un protocole de communication industriel, mais il peut aussi être utilisé comme couche gateway. Dans ce cas, un serveur OPC UA normalise l’accès aux équipements utilisant différents standards (Modbus, IEC 61850, DNP3…) en offrant à l’EMS une interface unique. Cela évite à l’EMS de devoir gérer nativement la diversité des protocoles terrain.
La sélection du protocole ne doit pas être faite au hasard. Trois paramètres doivent impérativement être analysés en amont :
- Les équipements terrain existants : RTU, IED ou automates doivent être compatibles avec le protocole choisi pour éviter toute passerelle inutile.
- Le SCADA en place : certains SCADA sont nativement orientés IEC 61850 (comme Zenon Energy Edition), d’autres privilégient OPC UA. Le protocole choisi doit maximiser l’intégration native.
- La criticité du site : par exemple, sur un site raccordé RTE, il est impératif d’utiliser IEC 61850 avec GOOSE pour garantir des temps de réaction inférieurs à 500 ms. Sur un site industriel standard, Modbus TCP peut suffire.
Attention : une mauvaise décision à ce niveau peut engendrer des coûts d’intégration élevés, des dégradations de performance et, à terme, des risques majeurs pour la stabilité énergétique de l’installation.

Le rôle stratégique du gateway dans l’orchestration des échanges
Dans l’architecture d’un site énergétique piloté par un Energy Management System, le gateway joue un rôle clé pour assurer une communication fluide avec les systèmes de contrôle-commande. Véritable intermédiaire, il permet d’abstraire la complexité terrain et de simplifier les échanges entre des environnements souvent hétérogènes.
Le gateway peut prendre différentes formes selon les besoins du projet :
- Une passerelle industrielle pour convertir des protocoles incompatibles
- Un serveur OPC UA pour standardiser l’accès aux données terrain
- Une API REST pour exposer les informations vers des couches applicatives IT modernes.
L’objectif est d’uniformiser la présentation des données et des commandes, tout en masquant les spécificités des équipements sous-jacents.
Le recours à un gateway présente plusieurs avantages :
- Découplage complet entre contrôle-commande et EMS : supprime toute dépendance directe entre les systèmes, simplifiant la maintenance, les évolutions fonctionnelles et les opérations de mise à jour.
- Traduction automatique des protocoles : permet l’interconnexion transparente d’équipements exploitant des standards différents, sans besoin de développement spécifique.
- Renforcement de la sécurisation des échanges : intégration native de couches de chiffrement, de mécanismes d’authentification et de contrôle d’accès, pour protéger les flux critiques contre les cybermenaces.
Cas concret d’intégration : EMS, SCADA et contrôle-commande sur un site ENR
Sur un site hybride combinant des panneaux photovoltaïques et des batteries de stockage, l’intégration entre l’Energy Management System, le système SCADA et le contrôle-commande permet d’assurer un pilotage énergétique précis et réactif. L’EMS supervise en temps réel la production solaire, l’état de charge des batteries et les besoins réseau, et envoie des consignes à la milliseconde pour ajuster la production ou la consommation.
Le contrôle-commande, constitué de RTU, IED et automates industriels, exécute immédiatement les consignes sans latence en contrôlant localement les équipements. Cette rapidité d’exécution est indispensable pour assurer la stabilité du site face aux fluctuations de la production solaire ou aux demandes de soutien réseau.
La supervision, quant à elle, est assurée via un IHM SCADA, offrant une visualisation temps réel des flux énergétiques, des alarmes et de l’état des équipements. Toutes les données sont simultanément historisées dans l’EMS, permettant d’analyser les performances du pilotage et d’optimiser les stratégies énergétiques du site.
Cette architecture permet d’exploiter pleinement les capacités du site ENR tout en garantissant agilité, réactivité et maîtrise complète de l’énergie produite et stockée.
Un Energy Management System n’a de valeur que s’il interagit de manière fluide et fiable avec le contrôle-commande et le SCADA. Sans accès aux données terrains en temps réel et sans capacité à transmettre ses consignes avec précision, l’EMS devient inopérant. Il serait alors incapable d’optimiser la gestion énergétique du site.
Garantir cette fluidité exige une maîtrise complète de l’architecture, depuis les capteurs et IED, en passant par les RTU, jusqu’aux couches SCADA et EMS. C’est la capacité à intégrer et orchestrer l’ensemble de ces blocs technologiques qui conditionne le succès opérationnel d’une architecture de solution énergétique.
Chez JSA Groupe, nous assurons une intégration de bout en bout, en combinant une expertise terrain reconnue depuis plus de 15 ans avec une vision stratégique globale. Nous concevons, installons et optimisons des architectures robustes pour offrir à nos clients un pilotage énergétique fiable, sécurisé et évolutif.
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